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Archives. Au Luxembourg, le Cercle de l’Art moderne, collectionneurs d’avant-garde au Havre, en 1906 !


Le Cercle de l’Art moderne a été créé le 29 janvier 1906 au Havre, par un groupe rassemblant des collectionneurs et des artistes dont Georges Braque, Raoul Dufy et Émile Othon Friesz.

Albert Marquet, Intérieur à Sidi-Bou-Saïd (détail), vers 1923, huile sur toile. Collection Olivier Senn, Musée d’Art moderne André Malraux, MuMa, Le Havre © MuMa, le Havre - Florian Kleinefenn / Adagp, Paris, 2012

Olivier Senn, Charles-Auguste Marande, Pieter van der Velde, Georges Dussueil, Oscar Schmitz, et Édouard Lüthy comptent alors parmi les principaux de ces amateurs d’art havrais.

Leur objectif est de promouvoir l’art moderne dans la ville. Ainsi, de 1906 à 1910, le Cercle organise des expositions, des cycles de conférences, des soirées poésie et des concerts, rassemblant jusqu’à 272 œuvres d’artistes... qui deviendront célèbres.

Frantz Jourdain, Guillaume Apollinaire, et Claude Debussy apportèrent leur parrainage à cette association, qui affiche d’emblée sa filiation avec le jeune Salon d’Automne.

À l’instigation du Cercle, les œuvres des plus grands artistes du moment sont présentées, notamment :
- des œuvres impressionnistes (de Monet, Renoir, Sisley, Guillaumin),
- d’autres néo-impressionnistes (de Cross, Signac et Luce),
- d’autres encore de peintres Nabis (de Bonnard, Maurice Denis, Sérusier, Vallotton et Vuillard),
- mais aussi des tableaux d’artistes fauves du Salon d’Automne de 1905 (Camoin, Derain, Manguin, Marquet, Matisse, Puy, Braque, Dufy, Friesz, et Vlaminck).

Ces artistes bénéficient tous au Havre d’un accueil favorable et leur production récente de possibles débouchés en ville, quand bien même celle-là provoque des scandales comme ce fut le cas avec l’affaire dite "de la cage aux fauves".

Qui sont ces hommes ? Qu’est-ce qui les lie ? En quoi le contexte historique, économique et culturel havrais favorise-t-il l’émergence de ce phénomène ?

Robert Frémond, Les Collectionneurs havrais visitant une galerie de peinture (vers 1910). Aquarelle sur papier. Ancienne collection Georges Dussueil, collection particulière © Florian Kleinefenn

Dès le milieu du XIXe siècle, cette ville industrielle de création récente (1517) voit son port se développer rapidement pour devenir une remarquable place dans l’importation et le négoce des produits exotiques, et ses acteurs économiques, comme ses édiles locaux, cherchent à conférer à la cité une « âme ». Toutefois, ne nous y trompons pas, la plupart des achats se font dans la capitale.

La création sur les quais de l’avant-port du musée (1845), la tenue régulière d’expositions organisées par la Société des amis des arts, et l’invitation faite à des artistes de renom (Manet y sera récompensé en 1868 pour son Torero mort… refusé 5 ans plus tôt au Salon de Paris) en témoignent.

Albert Marquet, La Femme blonde.

Les négociants s’impliquent dans cette vie culturelle, et le succès de leurs affaires influence directement le sort des artistes. Eugène Boudin ne résumera-t-il pas l’équation en une formule lapidaire : « Pas de coton, pas de tableaux » ?

À la fin du XIXe siècle, une nouvelle génération de collectionneurs, tous issus de la Société des amis des arts, apparaît. Plus ouverts à la jeune création, ils fréquentent à Paris les expositions du Salon d’Automne et des Indépendants, les galeries de Druet, Bernheim, Vollard, les ateliers d’artistes et les salles des ventes.

Ils s’investissent aux côtés de Dufy, Friesz et Braque dans cette aventure singulière. Les collections de deux d’entre eux, Olivier Senn et Charles-Auguste Marande, sont désormais conservées au musée d’Art moderne André Malraux, au Havre, grâce à leur propre générosité ou à celle de leurs descendants. Dispersées, celles des autres, van der Velde, Dussueil, Schmitz, Lüthy, sont bien connues.

Chacune révèle la personnalité de son auteur.

Charles Camoin (1879-1965), La Saltimbanque au repos (1905), ancienne collection Pieter van der Velde, Paris MAMVP © RMN-Grand Palais / agence Bulloz

Si elles présentent des similitudes, dues à des communautés de goût (pour Boudin, Pissarro, ou Marquet), elles trahissent également des singularités et des audaces propres à chacun.

Senn ouvre par exemple sa collection avec deux œuvres majeures de Delacroix et Courbet des années 1850. Il la poursuit avec des pièces impressionnistes et post-impressionnistes, alors que Dussueil et van der Velde portent d’emblée leur attention sur la création toute récente, achetant Matisse au même moment que les Stein, et avant les grands collectionneurs russes Morozov ou Chtchoukine.

Degas et Cross sont largement représentés dans la collection Senn, alors que van Dongen se voit préféré par van der Velde ou Dussueil.

Les connivences comme l’émulation sont évidentes, et il n’est pas rare de voir les œuvres circuler et changer parfois de propriétaires.

Albert Marquet, Le 14 juillet au Havre, 1906.

Et ce qui peut surprendre de nos jours, ce sont ces murs littéralement couverts de tableaux, les uns serrés contre les autres, telles des écailles de tortue, quand nous accordons aujourd’hui à chaque œuvre une respiration et un espace...

L’exposition présente environ 90 œuvres. Elle invite à pénétrer l’univers intime des collectionneurs qui, au-delà de leur intérêt privé, se sont retrouvés au sein du Cercle pour défendre une certaine conception de leur engagement au service de l’art moderne, des artistes, mais aussi celui de la cité.

Elle évoque en écho le cheminement personnel des artistes « du Cercle », unis dans la défense du fauvisme dans un premier temps, et que leurs recherches propres conduiront peu après à se séparer.

Kees van Dongen, La Parisienne de Montmartre (1907-1908), ancienne collection Charles-Auguste Marande, Le Havre, MuMa © Florian Kleinefenn

Dès lors, le Cercle de l’Art moderne apparaît comme la manifestation d’un phénomène unique en province, éphémère, une sorte de moment de grâce porté par des acteurs convaincus de la nécessité de défendre la modernité, et qui attachera à la ville et au territoire qui l’a vu naître son image d’avant-garde.

Quelques très anciennes photos du port du Havre, tirages remarquables sur papier albuminé, de Warnod (1851) et de Le Gray (1856) ; de beaux Renoir bien sûr L’Excursionniste (1888) et Le Portrait de Nini Lopez (1876) ; Le 14 Juillet, de Marquet, parti dans une collection particulière en Grèce ; La galvanisante Saltimbanque au repos (1905), de Charles Camoin, qui fit vraiment scandale ; La Parisienne de Montmartre (1907-1908), de Kees van Dongen ; et La Salle à manger rue Truffaut, de Vuillard.

Annette Haudiquet, conservateur en chef au Musée d’Art moderne André Malraux (MuMa), est le commissaire général de cette exposition ; Géraldine Lefebvre, attachée de conservation au Musée d’Art moderne André Malraux (MuMa), le commissaire scientifique ; la scénographie est de Jean-Julien Simonot.

Le Cercle de l’art moderne : des collectionneurs d’avant-garde au Havre, au musée du Luxembourg, du 19 septembre 2012 au 6 janvier 2013. Tous les jours de 10h à 19h30, nocturnes le vendredi et le lundi jusqu’à 22h. 11 ou 7,50€, gratuit pour les moins de 16 ans, métro Saint-Sulpice ou Mabillon, Rer B, Luxembourg, Bus 58, 84, 89 ; arrêt Musée du Luxembourg / Sénat

Vous retrouverez dans les articles « 2012 à Paris : les grandes expositions de A à Z » et 2013 à Paris : les grandes expositions de A à Z » les différentes expositions 2012 et celles de 2013 déjà annoncées par leurs établissements et musées.

David méditant devant la tête de Goliath, d’Orazio Gentileschi, huile sur lapis-lazuli, exposition Artemisia

Dans les articles « Calendrier 2012 des grandes expositions à Paris », et « Calendrier 2013 des grandes expositions à Paris », ces mêmes expositions sont classées par dates.

Nous nous efforçons de tenir ces articles à jour, et nous vous remercions des suggestions, précisions, ajouts et corrections que vous pourriez apporter à ces programmes.

Nous vous indiquons chaque semaine les nouveautés, les expositions qui fermeront bientôt leurs portes, et... nos préférences, car on ne se refait pas : "LA SEMAINE des expositions, musées, et galeries : que faire à Paris du...".

Nous tenterons aussi de vous les présenter chaque mois , à partir de Février 2013.

Enfin, contre l’actualité artistique qui chasse ce que l’on se croyait capable de retenir, les catalogues d’expositions peuvent avoir, quand ils sont faits avec exigence, un rôle certain à jouer. Nous avons établi notre sélection, pour Paris, des MEILLEURS CATALOGUES des expositions 2012, en vous indiquant en plus les nominés, et les primés au Prix CatalPa 2012 pour les catalogues d’expositions de Paris.

Nous procéderons de la même manière en 2013, avec PARIS 2013 : les meilleurs catalogues d’expositions de Paris.

André Balbo

sources : visite, musée du Luxembourg

Informations pratiques
Adresse, horaires, numéro de téléphone, liens...

19 Rue de Vaugirard 75006 Paris

- Du 19 septembre 2012 au 6 janvier 2013

- Tous les jours de 10h à 19h30, nocturnes le vendredi et le lundi jusqu’à 22h

01.42.34.25.95
lundi 6 mai 2019,    Expositions