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L’abstention aux élections en France : Etat des lieux

Les jours de scrutin, le premier chiffre donné par les journalistes est toujours celui de la participation. Avant le Jour-J, c’est la grande inconnue. Décryptage du choix de ceux... qui refusent de choisir.


Retrouvez ici notre article sur le vote blanc

Dire que les abstentionnistes forment « le plus grand parti de France » est devenu un lieu commun journalistique. Pourtant, cette allégation ne se vérifie pas toujours. Le scrutin de 2007 a déchaîné les passions. Il a été très suivi. L’abstention a atteint un chiffre historiquement bas. La presse internationale avait salué le civisme du corps électoral français. Lors des deux tours, seulement 16% des inscrits avaient refusé de soutenir l’un des candidats en lice.
 

Contrairement à ce que l’on pourrait envisager, le scrutin présidentiel détenant le record d’abstention n’est pas récent. Lors de l’élection de 1969, Georges Pompidou affronte Alain Poher. Tous deux étaient des hommes de droite. Le tonitruant Jacques Duclos, candidat communiste au premier tour, appelle ses partisans à s’abstenir au second tour de scrutin. Pompidou et Poher, « c’est bonnet blanc et blanc bonnet », tempête Duclos. 31% des électeurs ne participeront pas au deuxième tour.

Cinq ans plus tard, tout a changé. Le scrutin de 1974 bat des records de participation. Si le premier tour est déjà très suivi (84,2% de participation), les Français se pressent dans les isoloirs pour arbitrer le duel entre Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand. L’abstention n’est que de 12,7% au second tour. Record à battre.

EN 2012, QU’EN SERA-T-IL ?

Les instituts n’ont commencé à sonder les velléités d’abstention pour la présidentielle de 2012 que tardivement. Les abstentionnistes seraient plus nombreux qu’en 2007. Pourtant, il est difficile d’établir un pronostic précis. De fait, les abstentionnistes constituent une masse fluctuante, mobile, changeante. Beaucoup de Français décident le jour même de se déplacer dans leurs bureaux de vote. On a d’ailleurs souvent établi des théories hasardeuses sur l’influence du soleil et de la pluie.

Cette année, le premier tour tombe pendant les vacances de Printemps des zones A, B et C. Certains se sont effrayés de cette concomitance malheureuse. Pourtant, l’expérience démontre que des scrutins hors vacances scolaires peuvent être peu suivis. A l’inverse, les électeurs ont participé massivement à certaines élections situées en pleins congés...

Pour 2012, quelques instituts de sondages – IFOP notamment – se sont lancés plus tôt que d’autres dans une estimation de l’abstention. Les premiers chiffres laissaient à penser que près de 30% du corps électoral n’entendait pas donner son avis les 22 avril et 6 mai. Peu à peu, le recoupement des chiffres donne une abstention se situant entre 20% et 25%. Elle serait donc plus forte qu’en 2007, moindre qu’en 2002.

LE MÉCANISME ABSTENTIONNISTE

Quels seront les moteurs de l’abstention de ce printemps électoral ? En 2007, on a beaucoup parlé de la ferveur qui s’est emparée des soutiens de Nicolas Sarkozy et de Ségolène Royal. Le cycle Chirac s’achevait. Les candidats étaient relativement nouveaux dans le paysage politique. Leurs personnalités étaient particulièrement clivantes. L’un parlait de « rupture », l’autre bousculait certaines idées reçues à gauche. 

Rejets et engouements s’entremêlaient lors d’une campagne particulièrement vive. Dans les quartiers en relégation, souvent abstentionnistes, la candidate de gauche avait réussi à faire venir sur son nom bon nombre d’électeurs.

Le quinquennat passé a été celui de la crise financière mondiale. On a beaucoup débattu sur la capacité de réaction du monde politique face à celui de la finance. Bon nombre de discours ont scandé la naissance d’une réappropriation du champ décisionnel par la politique. Néanmoins, certains observateurs ont souligné l’impossibilité d’action du politique sur l’économique, dans la mondialisation. Ce débat a laissé des traces. « A quoi bon voter ? La politique n’a plus les clefs pour s’opposer aux marchés, à la finance », estimeront certains Français ce dimanche.

Il existe également une abstention militante. Certains refusent de voter tant que le vote blanc ne sera pas pris en compte lors de la répartition finale des voix. Ils entendent ainsi pratiquer une abstention exigeante, en rupture avec l’offre politique du moment.

Ensuite, un nombre infime de groupuscules (anarchistes, identitaires), situés hors du champ politique traditionnel, appelle régulièrement à l’abstention. Souvent, ils dénoncent le principe même de la démocratie représentative. Leur capacité à orienter l’électorat semble toutefois très réduite. Enfin, certains membres du corps électoral manifestent ostensiblement leur désintérêt pour la chose publique. Leur nombre est fluctuant.

A cinq jours du scrutin, les absents peuvent encore envisager une procuration... de dernière minute.

Informations pratiques
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Pour aller plus loin
mardi 16 février 2016,    Gaspar, Jean