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Vote blanc, vote nul ? Est-il comptabilisé en France ?

A la différence des abstentionnistes, ceux qui pratiquent le vote blanc – ou nul – se rendent dans l’isoloir. Ils entendent participer au scrutin mais aucun candidat n’a obtenu leur faveur. Dans l’urne, ils glissent une enveloppe vide ou un papier griffonné.


Retrouvez ici notre article sur l’abstention

Les instituts de sondages ne livrent pas en priorité les chiffres du vote blanc. Pour ce qui est du premier tour de l’élection présidentielle de 2012, il va falloir attendre les premiers chiffres du Conseil constitutionnel pour se faire une idée du vote blanc.

Le vote blanc et les problématiques qu’il engendre constituent un véritable serpent de mer. Souvent, lors des scrutins, certaines personnes réclament sa prise en considération dans le décompte total des voix. La campagne de 2012 est particulièrement concernée par cette question. Plusieurs candidats réclament une réforme du scrutin – par la prise en compte du vote blanc – après les élections de 2012.

LE VOTE BLANC AUJOURD’HUI

C’est l’article L66 du code électoral qui stipule que les bulletins blancs ou nuls ne sont pas pris en considération dans le décompte final des bulletins exprimés. Prenons un scrutin auquel participent 100 électeurs. 50 électeurs glissent un bulletin nul ou blanc dans l’urne. Un candidat X recueille 25 de l’ensemble des bulletins. Le score publié du candidat X ne sera pas 25% mais 50% : les bulletins blancs ne sont pas pris en compte.

Quelles différences y a-t-il entre le vote blanc et le vote nul ? Le vote blanc est le fait de ne pas mettre dans l’enveloppe de bulletin portant le nom d’un candidat. L’enveloppe peut être vide ou garnie d’un bulletin sans mention. Les bureaux de vote ne fournissent pas de bulletin sans nom. Par ailleurs, il est interdit de distribuer de tels bulletins à l’entrée du bureau de vote. Le bulletin nul lui, constitue un vote qui ne peut pas être interprété : un bulletin rayé, raturé, comportant un dessin, un mot. Plusieurs bulletins différents dans une même enveloppe constituent également un vote nul. En revanche, des bulletins semblables se trouvant plusieurs fois dans l’enveloppe entrent dans le compte du candidat correspondant aux bulletins : l’enveloppe compte pour un bulletin, donc pour une voix.

Si les votes blancs et nuls ne sont pas pris en compte, ils sont tout de même publiés. Leurs nombres sont cumulés. On parle de « bulletins blancs ou nuls ». En 2007, les bulletins blancs ou nuls constituaient 1,44% des votes de ceux qui s’étaient déplacés au 1er tour. Au second, le choix étant moins vaste, les votes blancs ou nuls rassemblaient 4,20% du total. A Paris, 0,82% des électeurs décidaient de ne porter leur suffrage sur aucun des candidats au 1er tour. Ils étaient 3,37% à voter blanc ou nul au deuxième.

En 2003, un projet de séparation des chiffres du vote blanc et du vote nul a été envisagé. L’idée, engagée à l’Assemblée, est restée lettre morte lors de son passage au Sénat. Lors du scrutin de 2012, les votes nuls comme les votes blancs seront rassemblés sous le même chiffre.

L’apparition des machines à voter dans certains bureaux de vote a quelque peu modifié la donne. Une touche correspond désormais au bulletin blanc. Le vote nul n’est plus possible par machine.

LES RESSORTS DU VOTE BLANC

Dans une certaine mesure, le vote blanc est plus facile à décrypter que l’abstention. Souvent, il est le fait d’électeurs soucieux de leur participation à la vie civique mais qui n’entendent soutenir aucun candidat. Ici, le principe de l’élection ou de la démocratie représentative n’est pas remis en cause en tant que tel. Au second tour, les raisons du vote blanc – qui est souvent plus élevé qu’au premier – sont encore plus claires. Des candidats sont éliminés au premier tour. Leur électeurs ne se retrouvent pas dans les propositions des finalistes. Ils manifestent donc leur défiance vis-à-vis des projets qui leur sont soumis au deuxième tour.

Les enquêtes d’opinion montrent également qu’une petite partie de l’électorat blanc refuse de choisir, ne s’estimant pas assez informée.

Les arguments des défenseurs du vote blanc sont divers. Les uns attendent que le vote blanc rétablisse la confiance entre candidats et électorat. Si le vote blanc obtenait un score très haut, le personnel politique serait obligé d’en tenir compte, de modifier sa politique, sa façon de voir les choses. Les autres expliquent qu’au lieu de se reporter vers "les extrêmes", les électeurs exprimeraient leur désarroi par le vote blanc, moins lourd de conséquences.

LA PRISE EN COMPTE EN DÉBAT

Tout en étant connu, le vote blanc n’est pas reconnu. Depuis plusieurs années, sa prise en compte fait débat. Plusieurs partis politiques – souvent en relatif retrait des lieux de décision – militent pour sa reconnaissance.

Le Parti du Vote Blanc (PVB) a pour unique ambition la prise en compte du vote blanc dans les résultats finaux. Un temps, il a même ambitionné de présenter un candidat à la présidentielle de 2012. Des partis plus médiatiques défendent également sa prise en compte. Le candidat du Modem, François Bayrou, propose un référendum sur la question. Son projet de consultation sur « la moralisation de la vie publique » contient une partie sur la reconnaissance du vote blanc. Le candidat du NPA, Philippe Poutou s’est déclaré favorable à sa prise en compte. De même, Nicolas Dupont-Aignan, entend associer à la mise en place du vote obligatoire, l’admission du vote blanc dans le calcul global.

On le voit, la demande de considération du vote blanc est le fait de mouvances, minoritaires, qui ont fait le constat de l’échec des partis majoritaires. Défendre le vote blanc peut être perçu comme un moyen politique de s’approprier l’abstention contestataire.

Dans les faits, la prise en compte du vote blanc pose de véritables questions. Certes, couplé au vote obligatoire, le vote blanc pourrait se substituer à l’abstention. Un moyen de ramener les désabusés dans le giron de la citoyenneté.

Cependant, comptabiliser le vote blanc dans les suffrages exprimés, c’est courir le risque de délégitimer l’action politique. Un président pourrait être élu sans obtenir la majorité des suffrages exprimés. Or, la force de la Constitution de la Ve République est de permettre au Président d’obtenir le soutien de la majorité des suffrages.

A dire vrai, peu de chefs d’État dans le monde peuvent se targuer d’avoir la même légitimité que le Président de la République française. Le second tour de scrutin oblige le corps électoral à choisir, à soutenir, à légitimer le Président. Encourager l’électeur à ne pas choisir, en reconnaissant son vote blanc, pourrait revenir à le déresponsabiliser. Or, c’est bien sur la responsabilisation de l’électorat que repose la démocratie.

Sur le plan juridique, la reconnaissance du vote blanc pourrait se heurter à l’article 7 de la Constitution qui stipule que « Le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés ».

Un sondage IFOP a montré que 75% des Français étaient favorables à la prise en compte du vote blanc. Cette idée semble avoir de beaux jours devant elle.

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Pour aller plus loin
mardi 16 février 2016,    Gaspar, Jean