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Interview de MC Solaar

Après plusieurs années de silence, MC Solaar nous revient avec un nouvel album. Entre rock, rap, pop et salsa, le poète nous emmène sur les traces de ses voyages et dévoile des horizons qu’on ne lui connaissait pas. Rencontre.




Mach 6 est sorti en 2003. Qu’as-tu fait depuis ?

J’ai pris le temps de vivre, j’ai fait quelques voyages, de la Belgique à l’Islande en passant le Danemark et le Portugal. Je suis aussi resté chez moi, à Paris. J’ai fait quelques concerts en Angleterre. Après ma tournée, j’ai eu deux années de tranquillité, j’ai surtout voyagé et j’ai regardé pousser les plantes !


C’est ce temps de tranquillité qui t’a donné envie de revenir ?

Non, je n’y pensais pas. Je savais qu’il fallait que je refasse quelque chose, j’avais envie une vraie pause d’un an mais j’avais envie aussi de refaire des concerts. On est parti avec l’équipe, les musiciens et quand j’ai revu ça, j’ai eu envie de rentrer en studio et de me remettre en "mode travail".


Combien de temps a demandé l’enregistrement de ces nouvelles chansons ?

Huit mois, au moins, ce qui est assez long. Je suis très enthousiaste, ça nous a fait prendre de la distance. Ca a donné des idées de musique aux Black Rose, et ça m’a permis de trouver des choses dont j’avais envie de parler : la théorie du complot, par exemple. Ces années ont servi de temps de maturation, on a voulu plus de rock après avoir vu certains groupes en live.


Tu parles de rock, y a-t-il d’autres courants qui t’aient inspiré sur cet album ?

A un moment, on a voulu faire le tour du monde en 45 tours ! On a fait des morceaux russes, reggae-ragga, ou rock pour voir ce qu’on pourrait en faire. On aime bien les titres rock parce qu’on peut les faire exploser en concert. Déjà sur Solaar pleure ou La Vie est belle, on avait une envie de rock.


Tu écoutes beaucoup de rock à la maison ?

Non, ce sont mes souvenirs de rock, de fusion, de rock alternatif, … Je n’en écoute pas trop, j’en écoutais à la radio. Pour moi, le rock c’est quelque chose de spontané, c’est l’image d’un mec un peu "vénère".


C’est l’image que tu as envie de donner de toi en ce moment ?

Je n’y arrive plus à prendre le personnage de l’énervé sur des morceaux de rap traditionnel car j’en connais trop bien les codes. Mais dès qu’il y a une musique rock quelconque, ça donne un autre élan, cette musique m’oriente dans une attitude que j’aime bien : un gladiateur, un combattant avec les dents serrées. J’aime bien !


Le son du titre Mollah Solaar Remix fait penser aux productions de hip hop US… Un style que tu écoutes ?

Oui, je suis obligé ! Là, il s’agit d’un remix sur lequel la Black Rose Corporation a totalement mis sa sauce pour montrer que c’est faisable en France. J’aime bien ceux qui racontent une histoire, qui ont une identité propre : Eminem, Jay-Z, Nas…


Des Antilles au Brésil, on fait le tour du monde avec cet album. Lorsque tu voyages, ramènes-tu avec toi de la musique locale ?

Oui, j’achète toujours des disques, de la variété locale. Dans Paris-Samba, tu rencontres une fille qui te fait visiter le pays et qui te montre ce qu’il y a de plus beau, mais tu vois aussi ce qui ne va pas dans la forêt amazonienne.


Dès l’intro, tu parles d’un sujet sérieux, celui de l’eau et de son manque dont souffrent certaines population. Une prise de conscience récente ?

Pas récente, on parle déjà depuis quelques temps de la "guerre de l’eau". Aujourd’hui, le manque d’eau potable devient une réalité pour plein de gens. Il y a des activistes qui font des choses simples mais très concrètes, comme creuset des puits. Je m’étais toujours dit que je pourrais faire un morceau pour dire aux gens que s’ils veuvent faire quelque chose dans le cadre d’une association, il ne faut pas hésiter, c’est faisable !


Tu avais envie d’aborder des sujets lourds, politiques ?

Ce qui m’importe, ce sont les sujets un peu lourds, qui nous réveillent. Ca fait longtemps que je vois à la télévision les conflits dans le tiers monde, les enfants-soldats, les mines anti-personnel, … C’est indispensable que j’en parle sinon j’ai l’impression de ne pas faire du rap. J’aime avoir toujours une ouverture sur le monde.


Dans In God We Trust, tu parles du "facteur chance", de la destinée. Tu es d’avis que l’on s’en remet trop souvent à des éléments extérieurs à nous-mêmes ?

J’ai voulu pousser les gens, leur dire qu’il n’y a a priori pas de prédestination. Cette chanson veut dire "saisis ta chance".


Sur Carpe Diem, tu as voulu exprimé une peur du temps qui passe ?

Oui. Sur cette chanson, le message est de profiter de la vie parce que le futur peut être sombre. D’habitude, je suis toujours dans une nostalgie positive. Là, je mets les gens dans le temps présent : le passé a été bien et si tu veux que le futur le soit aussi, il faut que tu agisses. Choisis ton avenir !


Et toi, as-tu l’impression de suffisamment profiter du quotidien ?

Je ne profite pas assez du quotidien, je ne fais pas tout ce que j’ai envie de faire. Je ne dédie pas de temps aux choses et je me dis que j’aurai le temps plus tard.


Par exemple ?

Je ferais beaucoup plus de choses si je pouvais les faire anonymement. Si je commençais le judo, les gens ne voudraient pas me faire de mal. Si je prenais un cours de langue, je suis sûr que je ne serais pas noté comme les autres. Il n’y a que le soir, quand les gens ont bu de l’alcool, qu’ils ne font plus attention ! A partir de l’happy hour, c’est bon !


Sur le premier single, Da Vinci Claude, tu parles de complots, de la désinformation…

Le but est de ne pas tout prendre pour argent comptant. En Italie, on raconte aux petits que s’ils font pipi au lit, on leur coupe leur zizi pour en faire des spaghettis ! Ca mélange plusieurs ingrédients : la confusion des masses, la guerre psychologique, la surinformation, des hypothèses multiples... On peut facilement s’y perdre parce qu’il y a du vrai, du faux, du probable et de l’improbable. Et comme la musique accélère sans cesse, tu n’as pas le temps de réfléchir, tu es happé.


Avec le titre Merci, tu avais besoin de faire le point sur ta carrière et de remercier les gens ?

Ouais. A en moment, quand tu regardes ton cheminement, tu te rends compte que tu as eu beaucoup de chance, de sourires, que des trucs bien ! Tu te dis : "merde, quelle chance !". Ce morceau, c’est le bilan du meilleur !


MC Solaar, Chapitre 7
Sortie le 18 juin 2007

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vendredi 30 juin 2023,    Jean