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L’exposition le musée imaginaire d’Henri Langlois s’installe à la Cinémathèque


Mais qui était donc ce personnage infatigable si haut en couleurs ? Ce pédagogue-né, à qui tant de cinéastes de tous pays doivent autant ? Cet inventeur d’institution qui voulait montrer des films sans qu’il y ait ensuite débat ? Celui qui disait que la vraie force de la Cinémathèque était son public, et qui le prouva en faisant plier l’État lors de "l’affaire Langlois" en 1968, avant Mai, État contraint de lui reconnaître, après l’épreuve de forces qui se tint au Cnam, "l’intégralité de ses droits, biens, et obligations" ? Celui, enfin, qui programmait Charlot soldat mais projetait Le Cuirassé Potemkine, ou présentait des films dont les sous-titrages étaient dans des langues hautement improbables ?

Il disait que : "depuis la nuit des temps, l’homme jouait avec les ombres, avec des poupées, avec lui-même, se servant du pinceau de la couleur. Il attendait, il espérait l’image cinématographique qui allait lui permettre de capter le temps, de l’arrêter, de le fixer, de le prolonger, de le vaincre." (1955)

Il avait apparemment une mission qu’il se devait de mener à bien !

Dès les années 1930 et la fin du muet, Henri Langlois (1914-1977) avait pris conscience de la place que prendrait le cinéma parmi les autres arts. La Cinémathèque française (avec quelques complices), fut son œuvre. Elle a été souvent modèle et à l’origine de la création d’institutions de même nature à travers le monde. Langlois a été un pionnier de la restauration et de la conservation des films, entreprenant des archives avec des fonds privés.

Ses premières grandes rencontres structurantes pour son projet de cinémathèque furent le réalisateur Georges Franju et l’historien Jean Mitry, avec qui il allait fonder la Cinémathèque française le 2 septembre 1936, conçue comme une salle et un musée du cinéma.

Il y eut aussi deux femmes exceptionnelles : Lotte H. Eisner, historienne du cinéma allemand et Iris Barry, qui dirigeait le département du film au MoMA, et qui lui obtint une copie du Voyage sur la Lune (1902), de Méliès.

« Il s’agit avant tout de montrer des films et non de discuter après. Les débats ne servent à rien », dira-t-il. L’éditeur Harlé, qui avait avancé quelques fonds, en sera le premier président, et le premier pourvoyeur. Et ils se lancèrent auprès des cinéastes dans l’alerte générale : aucune conservation de vos films n’est prévue. Confiez-nous une copie.

De 10 premières copies de films en 1936, le fond de la Cinémathèque allait atteindre plus de 60 000 en 1970 !

Avec le cinéma, de grands artistes comme Henri Matisse, Max Ernst, Miró, Picabia, Léger, Magritte, Beuys et Andy Warhol, notamment, trouvaient des solutions pour réaliser la gageure et leur passion de figurer le mouvement. Henri Langlois fut celui qui inventa ce musée où ces maîtres, et tout un chacun, pouvaient puiser et s’enrichir des regards des autres dans un monde qui accélérait et devenait de plus en plus mouvements, vitesses et rythmes.

Simultanément, le musée de Langlois aidait à découvrir l’influence que les cinéastes recevaient des arts visuels plus anciens. Jean Renoir, Eisenstein, Charlie Chaplin, Fritz Lang, Hitchcock, Godard en copiaient même les maîtres !

Truffaut racontait qu’il y avait tout un cérémonial pour parvenir à voir les grands films à la Cinémathèque. Réserver 2 semaines à l’avance, squatter le premier rang ou se coucher par terre. Voir un film nécessitait donc de s’y rendre par deux fois !

Le goût de Langlois pour un cinéma "essentiellement plastique", non "aliéné" à la narration, lui fit défendre les grands cinéastes-peintres : Ruttmann, Fischinger, Len Lye, Man Ray, Léger, Richter... puis Kenneth Anger, Paul Sharits, les recherches françaises des années 1960 de Martial Raysse à Philippe Garrel, la Factory d’Andy Warhol...

Dans sa programmation, Langlois ne justifiait jamais les rapprochements très personnels qu’il faisait entre les films. Cela devait relever pour lui de l’association d’idées, voire de l’écriture automatique surréaliste.

Ne serait-ce pas de ces programmations et de ces associations intempestives, si ce n’est intuitives, que naquirent des décennies plus tard les Histoire(s) du cinéma de Jean-Luc Godard ? Truffaut, Godard, Chabrol, Rivette, Rohmer allèrent à la Cinémathèque française... comme les peintres modernes fréquentaient le Louvre. Respect, continuité, discontinuité. S’inspirer et prolonger.

Langlois n’est-il pas un peu responsable de l’attachement que Rohmer développa pour Quai des Brumes ? De la leçon dont Rivette bénéficia avec les Serials de Louis Feuillade ? Du plaisir que Jacques Demy prit en contemplant l’énergie chantée de Danielle Darrieux ? De la réévaluation que Truffaut allait entreprendre pour l’œuvre des années 1930 d’Abel Gance ? Langlois « donna la lumière », selon le mot de Godard.

L’exposition consacrée à Henri Langlois illustre cette aventure qui intégrait la génération montante des cinéastes à une vision élargie de la création artistique. Et puis bien sûr, il y eut la question de la conservation des films... Haut-lieu de batailles épiques. Films rangés dans une baignoire, transportés dans un landau...

La manifestation montre, par des extraits de films, les rapprochements sidérants que Langlois eut l’audace de faire pour exposer les films (et le cinéma) au plus près de la sensibilité et de l’intelligence des spectateurs, comme on soignerait avec originalité, et un grand sens de la pédagogie, un accrochage de tableaux dans un musée.

Deux autres qualités déployées par Langlois étaient son talent de vigie dès lors qu’apparaissaient de nouveaux talents, et son immense curiosité de ce que la jeunesse produisait. Sa force était peut-être de s’adapter au fur et à mesure aux évolutions du cinéma.

Il nouait admiration et amitié avec bon nombre d’artistes, dont Matisse, Chagall, Picasso ou Léger. Un choix de leurs œuvres est confronté aux goûts cinéphiliques.

Enfin, ne se contentant pas d’un musée imaginaire, et impatient d’inscrire de façon décisive le cinéma comme un art parmi les arts, il conçut plusieurs autres projets de musées du cinéma à travers le monde (Cuba, États-Unis)...

Dominique Païni, qui fut directeur de la Cinémathèque française de 1991 à 2000, est le commissaire de cette exposition.

Le musée imaginaire d’Henri Langlois. Du 9 avril au 3 août 2014. À la Cinémathèque française, 51, rue de Bercy 75012 Paris. 01 71 19 33 33. Métro Bercy (6 et 14). Lundi, et mercredi à samedi de 12 à 19h. Week-end, jours fériés et vacances scolaires de 10 à 20h. Nocturne le jeudi jusqu’à 22h. Fermeture le mardi et le 1er mai. 10 ou 8€, 6 ou 5€, pour les moins de 18 ans 3€. Forfait expo + musée 12€.

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Vous retrouverez dans l’article 2014 à Paris : LES GRANDES EXPOSITIONS de A à Z les différentes expositions annoncées par leurs établissements et musées.

Frederic Leighton (1830–1896) Crenaia, the nymph of the dargle, ca. 1880 Huile sur toile 76.2x26.7 cm Colección Pérez Simón, Mexico © Arturo Piera, Musée Jacquemart-André 09/13-01/14

Dans CALENDRIER 2014 des grandes expositions à Paris, ces mêmes expositions sont classées par dates.

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Nous avons commencé à établir notre sélection, avec PARIS 2014 : LES MEILLEURS CATALOGUES d’expositions de Paris.

Celui de cette exposition en fait partie.

En grande nouveauté, car Paris, sans la province, ne serait vraiment pas grand chose... et est loin de nous être suffisant, nous vous proposons dorénavant une vue panoramique des Expositions et Festivals en province ? 2014. Expositions et Festivals en PROVINCE de A à Z. Ou encore CALENDRIER 2014 des Expositions et Festivals en PROVINCE

Avec des déclinaisons présentant davantage de détails par villes. dans les villes suivantes :
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André Balbo

sources : Visite, Cinémathèque française

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vendredi 27 janvier 2017,    Expositions